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SRADDET Agriculture et eau - Daniel Sauvaitre

( voir la vidéo )

 Le corridor de fret entre le sud, l’est et le nord de l’Europe en Nouvelle Aquitaine. Et pourquoi il faut regarder en face ce bout d’itinéraire que l’on ne veut pas voir.

Le rapport d’objectif du SRADDET évoque clairement le formidable corridor de fret routier qui traverse notre région entre la péninsule ibérique et l’Europe du nord ou l’Europe de l’est. La prise en compte des flux immenses de poids lourds qui traversent notre Région se traduit dans ce document par un certain nombre de propositions.

Dès l’objectif 2, on affiche la volonté d’un report modal du transport de marchandises de la route vers le fer et le maritime. La proportion concernée est à ce jour on le sait est extrêmement faible. 

Il est ensuite rappelé, et c’est l’objectif 23, que la Région assurera ses participations financières sur le réseau national dans le cadre des CPER 2015-2020 des ex régions Poitou-Charentes et Limousin. La RN 141 qui se trouve pour partie sur ce corridor de fret est concernée.

Et puis il est dit, et c’est aussi l’objectif 23, que l’aménagement routier du territoire doit se poursuivre afin d’optimiser les temps de déplacements et de connecter chaque territoire aux principaux axes routiers et autoroutiers. Chaque département concerné, dans le cadre de ses compétences, conduira sa politique routière et en assurera le financement. On va voir que pour la Charente, comme pour d’autres départements, ce ne sera pas simple.

L’objectif 48  va au-delà du report modal pour réduire ces trafics poids-lourds en transit international. Il évoque des itinéraires obligatoires, des péages, en plus des autoroutes ferroviaires et des autoroutes de la mer à créer.

Je rappelle quelle est la situation à ce jour au nord de ce corridor en Nouvelle Aquitaine.

Plus des deux tiers des poids-lourds qui franchissent les embouteillages de la métropole bordelaise s’engagent sur la RN 10 plutôt que sur l’A10. Une bonne partie ensuite des poids-lourds qui ont choisi l’A 10 ont bifurqué vers l’ouest avant d’arriver à Poitiers qui n’était pas sur leur trajectoire. Sinon ils seraient très logiquement passés par la RN 10 qui est le plus court chemin.  

Ces 12000 poids lourds qui utilisent dans les deux sens la RN 10 se partagent à  hauteur de 7000 environ sur l’axe Angoulême Poitiers et 5000 sur la RN 141 vers l’est de l’Europe.  

Ce que l’on sait moins, c’est qu’une bonne partie de ces 5000 poids-lourds emprunte la route départementale 951 entre la RN 141 et Bellac vers la Route Centre Europe Atlantique, La Souterraine, Guéret, Montluçon en passant par Confolens, Bellac, La Croisière.

La RN 10 entre Bordeaux et Poitiers et la RN 141 puis la D 951 vers Confolens, Bellac, La Croisière, La Souterraine, Guéret, Montluçon, sont les itinéraires les plus courts et les plus plats offerts par la géographie, l’un vers le nord, l’autre vers l’est. Ils ont été très logiquement adoptés par les transporteurs routiers.

Le chemin le plus court et le plus plat pour relier la péninsule ibérique avec l’est de l’Europe en évitant les agglomérations parisiennes et lyonnaises passe par Confolens et la D 951. Aller jusqu’à Limoges par la RN 141 pour remonter ensuite par l’A 20 est un allongement sensible de parcours et comporte un tronçon avec une pente de plus de 6% qui augmente les consommations de carburant et peut être difficilement praticable en hiver. 

Le trafic de poids-lourds supporté par la D 951 est ainsi largement supérieur à celui de l’autoroute A 10 entre Niort et Poitiers et bien sûr à celui supporté par l’A 89. Autoroute A 89 qui est une autoroute bien peu aux normes entre Bordeaux et Libourne, puisqu’elle ne dispose pas de bande d’arrêt d’urgence et que son tracé rencontre des pentes à plus de 6%, la rendant bien plus coûteuse en carburant et difficilement praticable par moment en hiver.  

La Charente a ce privilège que lui a donné la géographie d’être traversée nécessairement par les camions et contournée par les autoroutes dont elle est un des très rares départements de France à ne pas avoir un kilomètre.

Le report forcé vers l’A 10, vers l’A 89 ou vers Limoges par la RN 141 est donc assez peu logique en termes de sécurité ou de développement durable. La baisse du trafic par le report modal sur fer ou sur mer aura peu d’impact à court ou moyen terme.

Il serait à notre sens beaucoup plus pertinent que l’on inscrive dès maintenant dans notre SRADDET la nécessité de mettre aux normes autoroutières sur tout le trajet en Nouvelle Aquitaine ces corridors de fret sur les tracés dessinés par les roues des camions. Que ces tracés soient également dotés des parkings et aires de service qui garantissent la sécurité absolument nécessaire attendue par les  usagers et les  populations voisines.

La reconnaissance politique de ces corridors de fret européens justifierait aussi que l’on en projette un autre entre le port de La Rochelle et la RCEA par un tronçon aux mêmes normes autoroutières entre Niort et Bellac. Ce port par un accès au cœur de l’Europe justifierait le développement attendu de son activité, tant la Manche est encombrée.

Il est dès lors possible de transformer concrètement ce qui est principalement perçu comme une nuisance en opportunité de développement pour le nord et l’est de la Région. Ceci en adoptant la même stratégie qu’au sud de Bordeaux avec la mise à deux fois trois voies de l’autoroute concédée A 63 et donc un coût supporté par le fret qui s’échange.

Inscrire notre volonté pour ces corridors de fret serait un engagement pour l’Europe de la part de notre assemblée de toute première importance.